Quand la dragonne se réveilla, elle n’était plus dans la forêt. Le décor avait totalement changé. Des murs lisses et unis avaient remplacé les arbres rugueux et bicolores. La dragonne releva la tête. Elle était couchée sur une table, et des capteurs reliaient son corps à une étrange machine.
L’un des murs n’était pas comme les autres. Il était transparent, et on pouvait voir au dehors. Latias s’intéressa au paysage. Il faisait nuit. Elle devait être sur une colline, car elle avait une vue panoramique du lieu. Au-delà de ce mur, une forêt de béton noir et de lumières. Encore plus loin, des plages de sable, ainsi que la mer, entièrement noire à part les taches blanches de la Lune et des étoiles. Sur un côté, aussi, il y avait une tour qui projetait de la lumière vers la mer.
-Ca ressemble à notre île… Sauf qu’il n’y a pas cette drôle de forêt noire ! pensa Latias.
Elle s’intéressa à la pièce où elle se trouvait. La machine grise faisait de petits bruits, et des lumières s’allumaient parfois. De plus, quand la dragonne rouge tenta de se défaire des capteurs, elle émit des bruits aigus qui firent peur à Latias. A part ça, il n’y avait rien d’autre, et le Pokémon Eon recommençait à sentir de la fatigue. Elle allait s’endormir, quand…
-Latias… fit une voix lointaine dans sa tête.
Surprise, la femelle resta éveillée.
-Cette voix…
-Latias… Recommença la voix, plus forte.
-Gr… Grand frère ? Demanda Latias à voix basse.
-Oui.
-Mais… où es-tu ? Je ne te vois pas !
-C’est normal, nous ne sommes pas au même endroit. Mais, je peux te parler par télépathie.
-Où es-tu ? Répéta la dragonne.
-Je ne sais pas trop… Ca ressemble à chez nous…
-De là où je suis aussi ! Nous ne sommes peut-être pas très loin l’un de l’autre!
La dragonne rouge eut l’impression d’entendre son frère soupirer.
-Cela m’étonnerait, petite sœur… Mais, nous allons voir si nous sommes au même endroit. Ferme les yeux.
Latias s’exécuta.
-Maintenant, rouvre-les.
Elle obéit. Ses yeux d’ambre étaient bleu ciel maintenant. La dragonne poussa un cri de surprise. Le décor avait une fois de plus changé ! Il ressemblait à celui d’avant, mais la forêt de béton était encore plus étendue, plus haute, et il y avait de nombreuses falaises.
-Mais qu… ? Comment est-ce que… ?
-Tu ne te rappelles pas, petite sœur ? Réfléchis, rappelle-toi de ce que je t’ai appris. Cela ne te rappelle rien ?
Latias demeura silencieuse un instant, avant de répondre.
-La Vision Partagée ?
-Exactement. Maintenant, dis-moi. Est-ce que ça ressemble au lieu où tu es ?
-Non… Alors ça veut dire…
-Que nous ne sommes pas au même endroit, oui.
-Mais… Nous nous retrouverons, n’est-ce pas Latios ?
-Qui sait, petite sœur, qui sait…
Latias entendit du bruit, et fut obligée de rompre la Vision. Ses yeux redevinrent comme avant, couleur ambre. Elle voulut reparler à son frère, mais celui-ci était parti. Deux bipèdes entrèrent. L’un avait une drôle de peau blanche, avec du rose sur sa tête, l’autre ressemblait au bipède que la dragonne avait vu avant de s’évanouir. L’Homme avec du rose parla.
-Elle s’est réveillée. Tu as eu de la chance de l’avoir trouvée ! Sinon, elle serait probablement morte à l’heure qu’il est.
-Oui, mais grâce à ça, j’ai put la capturer. Et, c’est surtout mon Braségali qu’il faut remercier ! Sans lui, jamais je ne l’aurais découverte.
-Tu peux la reprendre, maintenant. Elle a suffisamment retrouvé de forces pour partir.
-Oui…
La bipède avec la crinière d’or s’approcha de Latias, une balle à la main. La même que celle qui avait emporté son frère. Tout d’un coup, la colère s’empara du Pokémon Eon. Elle lança un Dracosoufle, qui n’atteint pas sa cible.
-Allons, calme-toi ! Je ne vais pas te faire de mal !
Mais la femelle ne voulait rien entendre. Les deux Femmes évitèrent de justesse une Vague Psy.
-Bon, très bien ! Tu ne me laisses pas le choix ! Go, Tropius !
Un Pokémon semblable à un diplodocus sortit. Son corps était marron, parfois recouvert de feuilles géantes. Des ailes en forme de feuilles sortaient de son dos, et il avait des fruits sous sa tête.
-Doux Parfum !
Le Pokémon plante battit très légèrement des ailes, et un petit parfum envahi aussitôt la pièce. Latias se détendit, et l’Humaine en profita pour la rentrer dans sa sphère.
Le combat faisait rage dans l’arène. Il fallait dire qu’il s’agissait de la finale de la Ligue Hoenn.
-Jungko, Lance-Soleil !
-Braségali, Déflagration !
Les deux attaques furent lancées en même temps, et atteignirent leur cible au même moment. La foule était stupéfaite, car les deux adversaires s’écroulèrent d’un même mouvement.
-C’est extraordinaire, mesdames et messieurs ! hurla le speaker. Braségali et Jungko sont tombés KO en même temps ! Et il ne reste plus qu’un seul Pokémon à chacun des deux concurrents !
Le lézard des plantes et le coq de feu rentrèrent dans leur balle respective. Puis, le dresseur du Jungko prit une autre sphère, plus grosse et plus colorée que les autres.
-Tu risques d’être surprise en voyant mon Pokémon.. En plus d’être rare, il n’a jamais perdu une seule fois !
La dresseuse au Braségali sourit, et prit une autre sphère, identique à celle que tenait l’autre dresseur.
-Et bien, ce match va être très intense, je pense, car mon Pokémon aussi est très rare et très puissant. A toi !
-Go !
Ils envoyèrent leur Pokémon, qui apparurent en même temps dans un éclair blanc. La foule retint son souffle. Les deux Pokémon étaient quasiment identiques ! Seul leur taille et leur couleur variaient.
-Non… C… C’est incroyable… bégaya le speaker.
Les deux adversaires ouvrirent les yeux, et se figèrent. Tous les deux étaient des dragons, mais l’un était plus grand que l’autre. Le plus grand était bleu mer et blanc un peu foncé, le deuxième rouge clair et blanc neige. Ce fut le deuxième dragon qui prit la parole.
-Est-ce vraiment toi ?
-Je pourrais te retourner la question. Mais, il me semble bien que oui.
-Il n’y a qu’une seule façon d’en avoir le cœur net.
Le dragon bleu acquiesça. Les deux Pokémon fermèrent leurs yeux, puis les rouvrirent. Ils étaient à présent de couleur bleu ciel. La dragonne rouge eut l’impression de changer de point de vue. Elle était toujours dans l’arène, mais celle-ci semblait inversée. Et devant elle, se tenait… Elle-même ! La dragonne poussa un petit cri de stupéfaction, et la Vision prit fin. Les deux dragons se ruèrent l’un sur l’autre et, au grand étonnement du public et de leurs dresseurs, se serrèrent dans leurs pattes.
-Oh, grand frère ! J’ai cru ne jamais te revoir!
La dragonne avait les larmes aux yeux.
-Allons. Ne pleure pas, petite sœur. Plus rien ne nous séparera désormais.
Mais, leurs dresseurs ne semblaient pas du même avis.
-Latios ! Qu’est-ce que tu fabriques ? Eh ! Mais… Je le reconnais ce Pokémon ! C’est celui que Jungko avait battu, il y a quelques années ! Cette fois-ci, tu ne t’échapperas pas ! Allez Latios ! Ball’Ombre !
-Latias ! Ne te laisse pas faire ! Eco-Sphère !
Mais les deux Pokémon refusèrent d’obéir. Ils se tournèrent le dos, pour faire face à leur dresseur.
-Quoi ?! Mais enfin, Latias…
-Latios ! Bon, très bien ! Tu l’auras voulut !
Le dresseur du dragon prit une autre balle, et la lança. Un svelte chien noir et rouge en sortit. Des cornes blanches sortaient de sa tête, et des os lui ornaient le corps. Sa queue se terminait par une pointe, comme celle des diables. Le Pokémon hurla.
-Démolosse ! Fais-le obéir avec Lance-Flamme !
Le chien ouvrit sa gueule d’où sortit un déluge de feu. Latios s’apprêtait à y faire face, mais une aura bleue entoura les flammes, et les renvoyèrent sur leur propriétaire. Stupéfait, le Pokémon Eon se retourna. C’était sa sœur qui avait lancé cette attaque.
-Tu as fait d’énormes progrès depuis la dernière fois, petite sœur !
-Tu n’as encore rien vu !
-Latias ! Attention !
Démolosse avait évité l’attaque, et lançait à présent des Ball’Ombre. Latios se jeta devant sa sœur, et utilisa Mur Lumière. Les balles ténébreuses s’y heurtèrent, puis se dissipèrent sans leur faire le moindre mal. De plus, une sérieuse Vibraqua infligée par la dragonne affaibli le chien démoniaque.
-Tu vas voir…
Le dresseur de Latios et de Démolosse lança un autre Pokémon. Il s’agissait cette fois-ci d’un Pokémon préhistorique marron, avec des faux à la place des mains !
-Kabutops, Danse-Lames, Tour Rapide et Tranche !
L’étrange Pokémon fit une espèce de danse, tourna sur lui-même, et fit luire ses lames. Il s’approchait à grande vitesse, mais la Cage-Eclair de Latios le paralysa. Celui-ci se tourna vers sa sœur.
-Connais-tu ta botte secrète, maintenant ?
-Oui ! J’en ai même deux !
-Tout comme moi !
Latias se concentra sur ses pattes avants. De l’énergie pure apparut, et forma une sphère blanche. La dragonne la lança. Son frère sourit.
-Enfin, tu connais Ball’Brume ! Regarde-moi aussi !
Le dragon bleu se concentra, et une lueur blanche émana de lui. Elle s’intensifia, et aveugla les Pokémon du dresseur de Latios.
-C’était… Lumi-Eclat ?
-En effet. Et maintenant petite sœur…
-Le coup spécial des dragons.
-Dracochoc ! s’écrièrent les deux légendaires.
Une onde d’énergie partit d’eux et toucha le chien démon ainsi que le Pokémon préhistorique. Ils tombèrent assommés, à la joie de Latios et Latias.
-Comment as-tu pu me faire ça… Latios ! Tu vas payer pour cet affront ! Go !
Le dresseur fit apparaître son Jungko, son Xatu et un autre Pokémon, fait de métal, avec trois corps, des aimants et des vis. Les deux autres Pokémon se relevèrent, furieux. D’un commun accord, les deux dragons se mirent en position face aux autres Pokémon, mais avant qu’ils n’aient put lancer la moindre attaque, un Braségali, un Tropius, une méduse bleue avec de nombreuses tentacules, un Pokémon jaune avec une énorme mâchoire noire partant de sa tête et une grosse souris orangée avec une queue jaune en éclair apparurent dans des éclairs de lumière blanche, et s’interposèrent. Latias se retourna. Ces Pokémon appartenaient à sa dresseuse. Cette dernière prit la parole.
-Ca suffit ! Tu ne vois donc pas qu’ils se connaissent ? Tu ne penses donc qu’à la victoire ? Obliger ton Pokémon à obéir en te servant d’un autre n’est pas une solution ! Pire, c’est un acte abominable !
-Ah oui ? Et qu’est-ce que tu comptes faire, toi ?
-C’est très simple ! Latias, reviens !
La dragonne se figea, et fut aspirée dans sa sphère par un éclair rouge. Sa dresseuse la fit réapparaître, sortant cette fois-ci non pas avec une lumière blanche, mais verte. Le dresseur de Latios était sidéré, de même que les deux Pokémon Eon.
-Tu… Tu l’as…
-Relâchée, oui. C’est la seule solution. Ils ne se battront jamais l’un contre l’autre. Tu ferais mieux de faire pareil, indiqua la dresseuse au Braségali.
Le dresseur du Jungko grommela des paroles inaudibles, puis relâcha lui aussi son Pokémon légendaire. Aussitôt sortit, Latios s’envola haut dans le ciel, s’arrêta, et regarda sa sœur.
-Viens, petite sœur ! Nous n’avons plus rien à faire ici ! lui dit-il par télépathie.
-Non. Attends un instant. Je dois faire quelque chose avant de partir…
La dragonne rouge s’approcha de son ancienne dresseuse. Elle mit sa tête contre son buste, et l’Humaine lui caressa la tête pour la dernière fois.
-Merci Latias… Merci pour tout ce que tu m’as permis d’accomplir… Jamais je ne serai arrivée ici sans toi… Prends soin de toi.
Latias hocha la tête, puis s’éleva lentement dans les airs pour rejoindre son frère. Elle regarda une dernière fois derrière elle, puis ils partirent à toute vitesse rejoindre leur île.
Au-delà des mers qui bordaient Hoenn, une île, isolée dans l’océan. Elle n’avait rien d’extraordinaire : elle n’était ni grande ni petite, ne possédait pas de montagnes, … Juste quelques collines et falaises, ainsi qu’une petite forêt. Au centre de celle-ci, une clairière avec une pierre où était inscrit d’étranges symboles.
Sur une falaise, où venaient mourir les vagues, deux créatures, ressemblants à des dragons. Elles regardaient le soleil rouge sang se coucher sur une mer calme après des journées de tempête. La plus grande était rouge clair et blanc neige, avec un triangle bordé de bleu mer sur le poitrail. La seconde était bleu mer et blanc assez sombre, avec un triangle bordé de rouge clair au même endroit que l’autre créature. Le plus petit dragon prit la parole.
-Dis-moi, grande sœur, quand sortirons-nous de notre île ?
La dragonne sourit.
-Bientôt, petit frère, bientôt… »
FIN